2016 05 Relier delier langues

Le colloque international :

« Relier, délier les langues. Formes et défis linguistiques de la communication épistolaire (Moyen Âge – première modernité) »

se tiendra le 19 et le 20 mai 2016 à la MSHA de Bordeaux (salle 2) et à l’Institut Cervantès de Bordeaux.

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Il est organisé et cofinancé par les équipes CLARE EA 4593 et AMERIBER EA 3656 de l’Université Bordeaux Montaigne. Un financement a été sollicité à la Région Aquitaine. Le comité organisateur est composé par trois enseignants-chercheurs de cette Université (UFR de langues) : Maria Cristina Panzera, Elvezio Canonica et Agathe Sultan.

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Ce colloque se veut le prolongement d’une réflexion commune déjà lancée lors de deux évènements précédents :

107 - Exemplarité épistolaireEcaMS01b-        la journée d’études « L’exemplarité épistolaire » organisée le 11 mai 2012 à Bordeaux (financée par CLARE)

-        le Colloque international « La lettre au carrefour des genres et des traditions » qui a eu lieu à Bordeaux le 6 et 7 octobre 2013 et qui a été financé par CLARE et AMERIBER.

Ces deux événements ont donné lieu aux publications suivantes :

M. C. Panzera (dir.), L’exemplarité épistolaire, Bordeaux, PUB, collection Eidolôn, 2013.

M. C. Panzera et E. Canonica (dir.), La lettre au carrefour des genres et des traditions, Paris, Classiques Garnier, 2015.

Nous poursuivons donc nos travaux consacrés au genre épistolaire et à sa place problématique entre écriture de l’histoire et écriture de l’intime, dans une perspective interdisciplinaire et internationale. Le but de ce nouveau colloque est encore de faire rencontrer et dialoguer des spécialistes de littérature française, espagnole, italienne et plus largement de l’aire méditerranéenne, qui seront particulièrement sensibles à la question de la traduction des textes et de l’échange interculturel. Notre projet peut d’ores et déjà compter sur l’adhésion de cinq chercheurs de Bordeaux Montaigne (M. C. Panzera, E. Canonica, A. Sultan, V. Parello, A. Bouscharain) et sur une liste, encore à compléter, de collaborateurs venant d’autres institutions françaises ou étrangères.

 Problématique du colloque :

Les recherches sur l’écriture épistolaire connaissent un dynamisme particulièrement fécond depuis une trentaine d’années et appellent à une collaboration à l’échelle internationale qui puisse reconstituer un regard d’ensemble sur l’espace culturel formé par la République des lettres. Parmi les titres les plus récents, on pourra citer :

P. Martín Baños, El arte epistolar en el Renacimiento europeo (1400-1600), Bilbao, Univ. de Deusto, 2005.

J. Boutier, S. Landi, O. Rouchon (dir.), La politique par correspondance, Rennes, 2009.

L. Braida, Libri di lettere. Le raccolte epistolari del Cinquecento tra inquietudini religiose e «buon volgare », Milan, Laterza, 2009.

G. Ferreyrolles (dir.), L’épistolaire au XVII siècle, Paris, Champion, 2010.

Par rapport à L’exemplarité épistolaire et au volume consacré récemment aux croisements génériques, l’angle d’approche de notre colloque de mai 2016 se veut renouvelé car centré, cette fois, sur les dynamiques linguistiques : modèles et registres de langue, rhétorique, choix de traduction.

Dialogue inter absentes, reliant l’épistolier et ses destinataires en dépit de l’éloignement spatial et temporel, la lettre assure un lien social, intellectuel, politique, contribuant à la civilisation des mœurs (Norbert Elias). Un lien plus ou moins fort s’établit selon les époques et les contextes entre l’aspect formel de la lettre – son dispositif, ses stratégies communicatives, les registres employés – et les enseignements de la rhétorique (ars dictaminis, modèle humaniste cicéronien, influence de l’épistolographie hellénistique, etc.). Les choix linguistiques, relevant de la catégorie de l’elocutio, nous renvoient aux compétences rhétoriques et en même temps aux capacités expressives de l’épistolier, à ses exigences stylistiques, à la pragmatique de la communication par rapport à la communauté de parlants qui forme son public.

Medium de l’interaction à distance, la lettre supplée l’empêchement de l’échange oral par la profusion de la parole écrite, elle délie la langue, invite à l’épanchement de l’amitié et des sentiments, peut donner lieu aussi à une accumulation de digressions et de réflexions morales (devenant alors traité) ou, selon les cas, à l’enregistrement oisif et amusé de potins et de bavardages (voir Ortensio Lando, Lettere di molte valorose donne, Venise 1548).

Délier la langue, c’est par ailleurs une fonction de la communication épistolaire que le modèle de Cicéron autorise et même recommande, par la formule « quicquid in buccam venerit », si fréquente dans sa correspondance (Epistolae Familiares et Ad Atticum) : spontanéité, adhésion au langage commun, sincérité contribuent à l’effet de réel qui assure la réussite de l’échange épistolaire, comme forme discursive et comme genre littéraire.

Si l’on considère, enfin, les multiples possibilités de croisement et d’hybridation entre l’écriture épistolaire et les autres formes littéraires – poésie, narration autobiographique ou fictionnelle, prose didactique etc. – le questionnement sur la langue peut encore représenter une approche pertinente. Elle trouverait un large domaine d’analyse non seulement pour la période qui correspond à l’essor du classicisme renaissant, mais également pour le Moyen Âge : que l’on pense, par exemple, à l’œuvre de Guillaume de Machaut, qui comporte plusieurs épîtres insérées dans la narration, ou au corpus poétique – voir la récente édition collective des saluts d’amour du manuscrit BnF fr. 837 (Lettres d'amour du Moyen Âge, coll. « Lettres gothiques ») –, tout comme à la poésie des grands rhétoriqueurs, dite « de transition », avec la part que prennent, dans les pratiques de tant d’écrivains de cette époque, des échanges aussi bien lyriques qu'épistolaires (ainsi dans Les Douze dames de rhétorique). Les mélanges de styles et les croisements inter-génériques comportent-ils des variations au niveau des solutions linguistiques ?

Consacré aux formes, aux normes et aux défis linguistiques de la communication épistolaire dans l’espace roman (latin et langues vernaculaires), ce colloque se propose d’analyser les échanges écrits – non exclusivement de nature littéraire – pour l’époque qui va du Moyen Âge à l’époque prémoderne (XVIe-XVIIe siècles). L’analyse pourra porter également sur les aspects d’interculturalité, d’expérimentation, de mélange de registres et de langues. Plusieurs volets sont en effet prévus pour l’articulation des différentes contributions :

  •                  La langue dans les correspondances : outils de description, question de modèles et de normes, approches stylistiques à partir de faits de langue, etc.
  •                  Les traductions, adaptations, réécritures des recueils épistolaires, d’une époque à l’autre, d’un pays à l’autre; ainsi, dans ses Lettres des princes, G. Ruscelli (1561) adapte au public italien les correspondances diplomatiques émanant des principaux centres de pouvoir de son temps. Les traités de l’art épistolaire forment également une source importante à analyser: voir le manuel de Pietro Venerosi (1635) pour l’enseignement des lettres italiennes et espagnoles, étudié par E. Canonica (L’exemplarité épistolaire, 2013). 
  •                  Les choix linguistiques en fonction des différents genres épistolaires : les trois registres canoniques (le haut, le moyen, le bas), les codes de la familiarité épistolaire, les influences du style lyrique, la langue du répertoire amoureux, de la bucolique, de la satire, de l’invective (lettres in vituperium), de la facétie etc.
  •                  Les mélanges linguistiques à l’intérieur d’un recueil ou dans l’œuvre d’un auteur, les enjeux du plurilinguisme et de l’interculturalité (par exemple latin et langues vernaculaires ou langue nationale et dialectes etc.).

Pour les propositions de communication contacter :

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